Jacques Dominioni et son œuvre

Ruptures et continuité

L’oeuvre de Jacques Dominioni est une danse chaotique entre l’abstraction et la figuration.

Ces deux lignes de force s’y donnent la main et y échangent en permanence, elles s’interpénètrent laissant à notre regard la possibilité de découvrir de nombreux territoires plastiques.

Ainsi, parler de « Ruptures et Continuité », à propos de son oeuvre, en résume parfaitement la réalité : l’homme, Jacques Dominioni, réside au cœur de son œuvre et il en est aussi l’émanation, tant et si bien que ce qu’il accomplit le révèle au plus profond, ses cassures et ses ruptures, ses évolutions successives, signes d’une vitalité puissante, qui ne viennent pas rompre pour autant le fil qui relie « tout » du début à la fin, de manière flagrante.

Toute la vie artistique de Jacques Dominioni se trouve condensée et préservée dans son atelier de La Tardière en Vendée : ce lieu recèle en effet un grand nombre de ses œuvres. Elles révèlent le cheminement de sa vie d’artiste-peintre et les multiples techniques et mediums qu’il a explorés, y compris la sculpture.

Jacques aura connu la problématique qui touche de manière constante tous les artistes, celle des influences et des mouvements artistiques laissant une empreinte sur leur travail.

De quelle manière pouvait-il se situer dans ces mouvements artistiques spécifiques ?

Cette question a été évoquée avec lui. Pour tenter d’y répondre, les différents travaux de Jacques Dominioni, ont été regroupés en « périodes » et présentés en faisant allusion, éventuellement, aux grands courants artistiques qu’il a traversés et côtoyés de près ou de loin.

Quelques photos de Jacques à la Tardière

La Genèse de l’œuvre : « les tout-débuts »

Les études

Jacques Dominioni a vu le jour le 1er septembre 1934 à Paris.
Il a quitté les siens, sa demeure et son atelier, le 21 février 2014 à La Tardière, petit bourg du bocage vendéen.

Dès l’âge de 14 ans, en 1948, il entre dans le monde de la création artistique. Il fait l’apprentissage de la forme et de la couleur avec, déjà, des travaux sur toile et sur papier, notamment le papier japonais (croquis, dessins, collages, gravures, transferts). Puis, il s’initie à la sculpture, à la menuiserie d’art et à la céramique.

Les années 1948 à 1952, furent riches d’expériences ; Jacques Dominioni entre dans une école d’Ebénisterie d’Art à Paris, chez les Compagnons de l’Art du Trait et prend des « cours de style » au Musée du Louvre afin d’apprendre le dessin académique qui lui permet ainsi d’approcher le travail sur la forme.
Démarche incontournable avant qu’il n’aborde la couleur dans la peinture ou le dessin. Nombre d’or, perspective, diagonale et autres académismes le plongent dans la vie des grands maîtres de l’histoire picturale.
Peu à peu, la couleur apparaît plus ou moins aisément, repérable notamment dans ses esquisses. Alors une certaine vision prémonitoire de la peinture et du portrait, en particulier, (visages dans l’espace qui deviendront, bien plus tard, des corps) se développe.

En 1952, il quitte Paris, pour le Sud de la France.

Les premiers travaux

En 1954, il s’installe à Vallauris, jusqu’en 1959, et c’est là qu’il fait la rencontre de Monsieur Dubois, propriétaire d’une poterie, qui lui permet, en l’accueillant pour de menus travaux, de s’exercer à la fois à la céramique et de pratiquer la peinture dans un espace qui lui était réservé.

Le travail de peinture s’installe alors et prend forme : un travail par touches s’impose et déjà une approche quelque peu géométrique se fait jour.
Sa formation d’ébéniste le guide vers la sculpture et vers le design ainsi que le meuble contemporain.

C’est dans ce contexte qu’il rencontre Raymond Dauphin, peintre antibois, proche de la seconde Ecole de Paris, qui lui apprend « le vrai travail » comme il aimait à le dire.

Jacques Dominioni, tout respectueux qu’il était de la formation déjà acquise, prend conscience que son « parcours d’élève » est derrière lui et que ce qu’il a appris ne s’enseigne plus de la même façon : il peut aller jusqu’à dire que sa peinture n’est pas dépendante de ce qu’il a appris. Il ne lui reste que quelques tableaux ou dessins de cette période, qu’il considère comme des vestiges de ses années d’apprentissage.

Il est proche du peintre-sculpteur, Raymond Dauphin, (1910-1995), celui-ci était un ami de Picasso, Magnelli, Prassinos, et d’autres grands artistes de cette époque qui fréquentaient Vence et St-Paul de Vence (années 60/70).

Jacques Dominioni continue son apprentissage artistique, de même qu’il crée des structures en bois.

Tous les paysages du Sud de la France qui constituent son quotidien vont influencer sa peinture sur le plan de la couleur : ainsi les forts contrastes qui se révèlent en lien direct avec ces paysages méditerranéens qui l’environnent. Les couleurs qui apparaissent alors sortent des gammes colorées spécifiques liées à la terre provençale qui n’est pas sans rappeler l’Italie de ses origines.

Les sujets qui apparaissent sont de l’ordre de la figuration, noyée dans un environnement abstrait.

Nus, villages, natures mortes et instruments de musique révèlent aussi des cassures éprouvées dans sa vie. Ce mode rapproche ses oeuvres du cubisme vers lequel il va très vite s’orienter. 

Il y eut alors la rencontre avec Avenali, peintre lui-même, dont les oeuvres laissent apparaître le cubisme dans la composition et l’abstraction dans la forme ; celui-ci l’encourage à participer à des expositions collectives qui lui feront vendre l’intégralité des oeuvres de cette période. 

Ainsi, le soutien, tant de Dauphin que d’Avenali, lui fait dire qu’il est « à bonne école » mais il ressent qu’il lui faut absolument se séparer de ces artistes, si proches et généreux, afin que son travail ne soit pas « un sous-produit » des maîtres… C’est ce qu’il fera, très vite, en s’éloignant de Dauphin après son exposition, en Italie, à Potenza (Italie).

Jacques Dominioni soutenu et lancé sur le marché de l’art par Dauphin, rencontre alors le succès … 
Libéré de ses maîtres et détaché de la peinture poétique de Dauphin, il commence un travail de recherche qui lui ouvre la porte d’un autre type de monstration et c’est alors qu’il expose à la Chapelle des Pénitents Blancs de Vence en 1973. 

Une autre rencontre importante pour Jacques Dominioni est celle du peintre, sculpteur et céramiste Oreste Dequel, d’origine italienne tout comme lui. Il a entretenu avec cet artiste une relation non seulement amicale mais aussi une relation de qualité d’artiste à artiste.

Sa recherche s’approfondit laissant émaner une grande force expressive tant en peinture qu’en sculpture qu’il pratiquera parallèlement, les deux modes se faisant écho.

Quelques lignes de force repérables

Accéder aux différents travaux de Jacques Dominioni regroupés en périodes (galerie).

Remerciements

Ce document a été rédigé sur la base de l’interview que Jacques Dominioni avait accordée à Antoine Roux-Briffaut, jeune étudiant alors, et fils d’un grand ami de Jacques.
Puisse Antoine Roux-Briffaut être remercié pour ce travail qui va permettre au plus grand nombre d’entrer plus aisément dans l’oeuvre de Jacques Dominioni.

Laissons-lui la parole à travers les termes qu’il utilisait pour conclure le document de base :

« En vous remerciant de votre attention, concluons .. .. On a pu voir ou lire que l’ensemble de l’oeuvre picturale de Jacques Dominioni peut ou ne peut pas se rapporter à des mouvements artistiques particuliers, selon les périodes. Mini plagiat de son maître Dauphin, cubisme, Arden-Quin, orphisme, Hard Edge, expressionnisme abstrait.. . autant de mouvements picturaux auquel peut se rattacher l’oeuvre de Jacques Dominioni. 

L’artiste et peintre abstrait, change de technique, de forme d’expression selon ses sentiments… 
De ce travail de solitaire, les couleurs et la forme ne sont qu’un plagiat de la lumière, de la nature, du corps humain ou animal pour certains. En effet, le corps humain, source de forme, distribue toutes les possibilités de l’organique du tableau ; la nature et sa lumière, l’environnement en général, inspirent les couleurs, les rapports qui la régissent, le combat de la toile contre la toile. 

Seul face à cette entreprise, le peintre est ce solitaire qui crie par sa main. »

Et encore :

Grand merci
« Un merci à celui sans lequel ce dossier ne serait pas là, sans lequel les illustrations n’existeraient pas ici, sans lequel je n’aurais pas pris plaisir, sans lequel je n’aurais sûrement jamais feuilleté « Histoire de l’art » d’Ernst Gombrich, sans lequel je ne serais pas devant mon ordinateur à cette heure, sans lequel je ne me serais pas éclaté avec mon appareil-photo un mercredi après-midi , un grand merci à Jacques Dominioni. »

La bibliographie suivante permettra à ceux qui le souhaitent de « creuser » tous les sujets abordés dans ce texte.

Ernst Gombrich, Histoire de l’art, Flammarion 1992.

La petite encyclopédie de l’art, Éditions du regard, 1995.

Pierre Cabanne, Dictionnaire international des arts,
Bordas, 1979.

Univers des arts, collection Les Encyclopédies, Éditions
Félix Touron.

De l’impressionnisme à l‘art Moderne, Hachette Réalités.

Chef d’oeuvre de l’art / Grands peintres, numéro 20 : Michel-Ange, Hachette, 1978.

Télérama Hors-série, Dialogue de géants : Matisse et Picasso, septembre 2002.

Télérama Hors-série, Picasso, septembre 1996.

Beaux-arts Magazine, numéro 54, février 1988.

Beaux-arts Magazine, numéro 72, octobre 1989.

Petite tache au pays du cubisme, Éditions du regard, 1989.

L’art enjeu : Kandinsky, Éditions du centre Pompidou, 1988.

Musée d’Orsay Guide, Éditions de la Réunion des Musées Nationaux, 1992.

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